Sunday, August 2, 2009


7 MILLIARDS DE FACONS DE MOURIR OU CHRONIQUE AVEC DES LUNETTES ET UN FUSIL / DERNIER ROUND


Depuis quelques temps se distingue une forme particulière de polar : celle du Nord de l’Europe ; Henning Mankell et Camilla Lackberg pour le versant suédois, Arnaldur Indridason pour la face islandaise ou encore l’allumette suédoise Stieg Larsson, qui a mit le feu aux poudres avec sa série Millénium (dont 1000 à 3000 copies sont encore vendues chaque jour). 


Pas un jour ne passe sans qu’on nous révèle un talent caché venu du froid, à croire que les éditeurs commencent à manquer d’imagination. Mais qu’ont-ils donc que les autres n’ont pas ? Une nuit qui en hiver, dure 19 heures (les petits chanceux), une boisson nationale répondant au doux nom de Black Death, un plat national composé de requin faisandé… Mmmm. Miam. Et on en redemande.


Enfin entre le nord de l’Europe et le Québec, la distance n’est pas aussi grande qu’il y paraît. Pas de Black Death mais une Maudite ou une Fin du monde qui savent se défendre et des auteurs qui ne mangent pas de requin faisandé mais qui savent aussi écrire. 

Commencons par Francois Barcelo, qui fut le premier auteur québécois à entrer dans la prestigieuse Série noire de Gallimard. De Moi les parapluies à Chroniques de Saint-Placide-de-Ramsay en 2007, j’avoue ma préférence pour Cadavres et Chiens sales.

Surtout Cadavres, publié en 1998 chez Série Noire, sorte de réponse à L’Etranger de Camus : « Savez-vous quand j’ai commencé à regretter la mort de ma mère ? C’est lorsque les premières gouttes de pluie se sont mises à dégouliner par le trou de balle dans le toit de la voiture. J’ai ensuite essayé de retrouver son corps dans le fossé, mais je suis tombé sur le cadavre de quelqu’un d’autre ».

Patrick Sénécal est évidemment un incontournable auteur de thriller fantastique et un grand maître du roman d’horreur. L’histoire de Thomas Roy, écrivain d’horreur adulé retrouvé mutilé et catatonique dans Sur le seuil vaut bien son pesant de cacahuètes. 

Chrystine Brouillet fait elle aussi partie du cercle restreint des poids lourds québécois. De Cher voisine à Promesses d’éternité, elle dévoile une plume gourmande et sans prétention, qui lui vaut de nombreux fidèles.

Jacques Côté révèle ses amours décomposés (au sens propre) dans Le Rouge idéal et un certain sens de la formule et de la mise en condition dans Nébulosité croissante en fin de journée ( un des meilleurs titres de tout le polar québécois à mon sens).

Quant à Jean-Jacques Pelletier, c’est toute son œuvre qu’on peut conseiller, tant ses sujets sont traités d’une main de maître (manipulation des foules, exploitation, embrigadement idéologique…). 


Le polar québecois, c’est aussi Stanley Péan, Jean Lemieux, Maryse Rouy, Maxime Houde, André Marois, Laurent Laplante, Benoît Dutrizac, ou encore l’anticonformiste Nando Michaud (La guerre des sexes ou le problème est dans la solution). 

Et la liste n’est pas exhaustive.

Des romans d’espionnage des années 50-60 aux relents de gentils nanars propagandistes (ah l’agent X14…), au dernier opus de Jean-Jacques Pelletier (La faim de la terre, attendu pour octobre), le chemin n’est pas si long que cela. Le polar québécois mérite seulement qu’on s’y attarde et surtout qu’on le considère. Notons au passage que les éditions Alire ont joué un rôle considérable dans la reconnaissance du genre.

Enfin, voici quelques règles à respecter si vous décidez de vous lancer dans l’écriture d’un polar (énoncées par Elmore Leonard) :

Ne commencez jamais un livre en parlant de la météo, évitez les prologues, tenez la bride à vos points d’exclamations et ma préférée : n’utilisez jamais de tournures telles que « soudain » ou « l’enfer se déchaîna » (l’auteur rajoute ensuite pour notre plus grand plaisir que cette règle se passe d’explication).

S’il n’en restait qu’une : « si ça a l’air écrit, je réécris ».


Prochaine aventure : la censure et les barbouzards au Québec.

2 comments:

  1. Mais où vas-tu chercher tout ça??? Il s'en passe des choses dans le sous-sol de la librairie et l'inspiration y est de mise sans l'ombre d'un doute: ne change rien. Merci de prendre le temps de faire tout ce travail de déblayage littéraire jusque dans les profondeurs de notre merde, pardon, 'marde' existentielle; j'aime. Enfin de la substance qui vaut vraiment son pesant haut de gamme de cacahuètes et qui évitera aux plus fainéants d'entre nous, dont je fais honteusement partie, de faire le tri. J'espère que la presse Montréalaise en a conscience mais en attendant, moi, j'me régale à te lire en mangeant mon porridge et mes crumpets. Encore! Plein de bisous ma Sophie xxx

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  2. Je suis tellement anticonformiste que je ne supporte pas l'anticoformisme.

    Nando Michaud

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