Wednesday, January 27, 2010

JANVIER, AU NORD DE LA FRONTIÈRE, AU SUD DE NULLE PART

Ah janvier… Son lot de dépressions, de morts, d'estomacs retournés, de pensées en vrac… Qui a inventé la semaine de 7 jours? Et la minute de 60 secondes? Remercions les Hébreux et les astronomes babyloniens d'avoir, par leurs inventions, réussi à contenir autant de plaisirs et de souffrances dans leurs fines mesures.
On devrait faire comme les Diggers au XVIIe siècle, un groupe de communistes anglais avant la lettre, qui en réaction à l'implantation des machines qui menaçaient leur emploi dans l'industrie textile, décidèrent de casser toutes les horloges qu'ils pourraient trouver. Emmett Grogan en parle dans Ringolevio (publié chez Gallimard en 1998), livre que je relis régulièrement et qui raconte l'histoire d'un jeune irlando-américain de Brooklyn, voyageur-cambrioleur, qui se retrouve à Paris pendant la guerre d'Algérie, qui connaît la prison, s'engage dans l'IRA et fonde justement les Diggers de San Francisco dans les années 60, dont la principale préoccupation était de "libérer" des vivres pour les distribuer à des milliers de pauvres. Grand livre.
Comme disait Kurt Vonnegut dans Abattoir 5 : "Le temps est le temps. Il ne change pas. Il est simplement. Prenez-le instant par instant, et vous découvrirez que nous sommes tous… des insectes (préservés) dans de l'ambre".

En ce début d'année, adieu douce réalité des vacances, bienvenue aux fantasmes (du latin phantasma : fantôme, spectre) ; côtes vénézueliennes, Isla de la Tortuga, Jamaïca… Comme Prospéro, le vieux magicien de La Tempête de Shakespeare, je fais partie de ceux qui se réfugient dans leur bibliothèque à l'abri de toutes les tempêtes du monde (d'ailleurs, tempestas signifie beau et mauvais temps en latin). On découvre les plaisirs du thé et de la neige. On lit des auteurs japonais et de la littérature de voyage (ou érotique tiens, ça fera l'objet de notre prochaine chronique, c'est bon pour le moral la littérature érotique, surtout en février, la toupie québecoise, il parait que ça revigore, de même que l'hélicoptère hongrois… Je m'égare là, entre la pratique et la théorie, tout un fossé qui laisse place aux phantasma justement!).
Plus sérieusement, allons-y pour quelques propositions de lecture, afin de conjurer le mauvais sort et nous faire voyager au-delà des tempêtes.
Les Notes de chevet de Sei Shonagon, femme de lettres japonaise qui a vécu vers l'an 1000 à la Cour impériale, pour toutes les petites choses qu'on aiment et celles que l'on détestent (tant que ça s'équilibre…).
33, chemin de la baleine de Myriam Beaudoin, car il y en a de la grâce là dedans, comme dans tous ses livres d'ailleurs, et un talent salutaire, celui de se garder de tout jugement.
Haruki Murakami, Au sud de la frontière, à l'ouest du soleil (le titre en lui-même est une invitation au voyage).
Et la pensée du jour, par l'auteur de La Tempête : "C'est l'endroit ou l'eau est profonde qu'elle est le plus calme".